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Les 100 pertes les plus importantes du secteur des hydrocarbures

Les enseignements que nous pouvons tirer des deux dernières années

On se souviendra longtemps de la période 2020-2021 en raison des répercussions importantes de la pandémie de la COVID-19 et des perturbations généralisées qu’elle a entraînées dans presque tous les aspects de notre vie quotidienne.

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On se souviendra longtemps de la période 2020-2021 en raison des répercussions importantes de la pandémie de la COVID-19 et des perturbations généralisées qu’elle a entraînées dans presque tous les aspects de notre vie quotidienne. Heureusement, au cours de cette période, dans l’industrie de l’énergie, nous avons constaté un nombre relativement faible de dommages matériels suffisamment importants pour être admissibles à ce numéro de la publication des 100 pertes les plus importantes (100LL).

Seulement deux cas de dommages matériels ont été ajoutés au classement des 100 pertes les plus importantes depuis notre dernier rapport, publié en 2020, les coûts desquels s’élèvent respectivement à 200 millions de dollars américains et à 300 millions de dollars américains. Cela équivaut au montant moyen le plus faible jamais enregistré pour une période de deux ans dans le classement 100LL depuis la période 1995-1996 (voir la figure 1). Il s’agit également d’un changement remarquable par rapport aux derniers numéros de la publication 100LL, car les périodes 2018-2019, 2016-2017 et 2014-2015 ont contribué à hauteur de sept entrées (totalisant 4,1 milliards de dollars américains), quatre entrées (totalisant plus de 2,6 milliards de dollars américains) et trois entrées (totalisant 1,4 milliard de dollars américains), respectivement.

Figure 1

Le coût des ajouts au 100LL est indiqué en fonction d’un horizon mobile de deux ans.

Le montant relativement faible de 250 millions de dollars américains par année pour la période 2020-2021 est mis en évidence afin de faciliter la consultation (ligne orange).

* Graphique disponible en anglais seulement

La pandémie de la COVID-19 a eu des effets cataclysmiques sur le prix du pétrole brut et sur l’utilisation des raffineries. Le prix moyen du pétrole brut (Brent) pour l’année 2020 a chuté à environ 42 $ US le baril[1], atteignant son niveau le plus bas depuis 2004. Quant aux raffineries américaines, leur utilisation a également chuté pour atteindre 79 %. Il s’agit là du niveau le plus bas depuis 1985 (voir la figure 2). L’industrie pétrochimique a également enregistré des perturbations importantes, en ce qui concerne particulièrement les chaînes d’approvisionnement. Cependant, l’impact sur les capacités de production a varié grandement selon le type exact de produit pétrochimique fabriqué.

Figure 2

Utilisation des raffineries américaines de 1985 à 2021[2]

L’utilisation remarquablement faible en 2020 a été mise en évidence pour faciliter la consultation (ligne orange).

* Graphique disponible en anglais seulement

L’effondrement de la demande mondiale de pétrole au milieu de 2020 a donné lieu à un prix aussi faible que 9 $ US le baril pour ce qui est du pétrole brut Brent et un prix étonnamment faible de 37 $ US le baril pour ce qui est du pétrole brut West Texas Intermediate, en raison de problèmes d’entreposage cruciaux.

Après le choc immédiat causé par la COVID-19 en 2020, le secteur de l’énergie s’est en grande partie redressé au cours de l’année suivante, le prix moyen du pétrole brut (Brent) en 2021 se hissant à 71 $ US le baril, et l’utilisation des raffineries américaines atteignant 86 %.

La COVID-19 a eu d’énormes répercussions, tant directes qu’indirectes, sur le secteur mondial de l’énergie. Cela nous amène à nous demander si la forte réduction enregistrée sur le plan des nouvelles pertes importantes est une conséquence de la pandémie. Pour vous aider à répondre à cette question, nous avons examiné séparément les répercussions possibles à court et à long terme.

Raisons à court terme de la réduction des pertes importantes

La vague de pertes importantes que certains craignaient aux premiers jours de la pandémie ne s’est pas concrétisée. Cette situation est en partie attribuable au fait que les établissements ont réussi à gérer avec brio l’interruption des pratiques de travail établies au moyen de plans de continuité des activités bien exécutés. Ces plans ont englobé des ajustements apportés aux niveaux de dotation et à la gestion du risque de fatigue connexe pour les travailleurs de quarts. Un certain nombre d’autres facteurs peuvent également avoir contribué à atténuer les risques liés à la sécurité opérationnelle :

  • Une approche axée sur le « retour aux sources » adaptée à chaque site. Les nouvelles initiatives et les changements prévus ont été mis en attente, tandis que la priorité a été donnée à la stabilité des opérations plutôt qu’aux initiatives d’optimisation.
  • Un report des délais de production prévus et des grands travaux de mise en service de projets en raison des difficultés rencontrées par les établissements pour se procurer les matériaux et les entrepreneurs indispensables, ou en raison de l’impossibilité à mettre en œuvre des opérations complexes dans le respect des règles de sécurité liées à la pandémie de la COVID-19 qui incluaient notamment des restrictions d’accès physique au site ou le maintien de mesures de distanciation sécuritaires. La réduction connexe des travaux d’entretien et des opérations transitoires aura, du moins à court terme, contribué à éviter une cause fondamentale potentielle d’incidents liés à la sécurité opérationnelle. 
  • Un fonctionnement de nombreux actifs, en particulier en amont et à l’étape du raffinage, bien en deçà de leurs limites maximales d’exploitation sécuritaire.

Considérations et répercussions à moyen et à long terme

À l’avenir, un certain nombre de risques devront être gérés avec soin afin de prévenir d’éventuelles « pertes différées ». Les exploitants devraient tenir compte des éléments suivants :

  • Le report des délais de production a entraîné un important retard dans les travaux d’inspection et d’entretien. Si les risques associés au report de ce travail essentiel n’ont pas été gérés adéquatement, ou si l’arriéré n’est pas réglé en temps opportun, cela pourrait constituer une cause fréquente de pertes au cours des prochaines années.
  • L’exploitation des actifs au niveau de la capacité de production sécuritaire minimale peut avoir une incidence négative sur la fiabilité des actifs, en cas de gestion inadéquate. L’équipement peut s’encrasser plus facilement, les tuyaux des chaudières peuvent se cokéfier plus rapidement et les machines rotatives, comme les compresseurs et les pompes, peuvent davantage courir le risque de se briser après des périodes de fonctionnement à un niveau de capacité de production minimal.
  • De nombreux établissements ont suspendu leurs exercices d’intervention d’urgence pendant la pandémie en raison des difficultés liées au respect des lignes directrices en matière de sécurité relatives à la COVID-19. Cela peut signifier que les équipes d’intervention d’urgence ne connaissent pas aussi bien les plans d’intervention propres au site, ce qui pourrait par la suite nuire aux efforts d’atténuation en cas d’incendie ou d’explosion.
  • Un certain nombre de sites ont eu recours à des pratiques de travail à distance pour mener à bien les études prévues : études de dangers et d’exploitabilité, études de sécurité des projets ou encore évaluations des risques dans le cadre du processus de gestion du changement. Si elle n’est pas bien gérée, la qualité de cette analyse de la sécurité peut être compromise.
  • Certaines organisations ont pu connaître un roulement de personnel important, y compris des mises au chômage, depuis les prémices de la pandémie. La perte de personnel expérimenté, en particulier aux postes décisifs pour la sécurité, posera un risque évident si elle n’est pas gérée adéquatement.
  • Les répercussions financières de la pandémie sur les bilans pourraient accroître les activités de fusion, d’acquisition et de cession au cours des prochaines années. La perturbation causée par une transition mal gérée de la propriété peut précipiter des événements liés à la sécurité opérationnelle de diverses façons.

Du point de vue de la sécurité opérationnelle, la pandémie pourrait avoir eu des effets positifs indirectement à court terme. Cependant, l’impact à moyen et à long terme reste à voir.

Au moment d’écrire ces lignes, la plus récente perte vécue par le secteur en amont fondée sur l’analyse 100LL des services spécialisés de Marsh s’est produite en février 2016 (champ pétrolifère Jubilee au Ghana). Les cinq années suivantes constituent maintenant la période la plus longue au cours de laquelle aucune perte survenue dans le secteur en amont n’a été ajoutée au classement 100LL, et ce, depuis la période 1993-2001. Cela est particulièrement remarquable compte tenu de la chute du prix du pétrole brut survenue en 2020. Les deux dernières baisses notables du prix du pétrole brut, survenues à la fin de 2008 et en 2014, ont été suivies rapidement de plusieurs pertes importantes de dommages matériels dans le secteur en amont. Cela n’a pas eu lieu en 2021 (voir la figure 3), et le crédit doit être accordé aux exploitants à l’échelle mondiale, car ils ont géré avec brio ces périodes les plus difficiles à ce jour.

Figure 3

Graphique montrant le prix moyen du pétrole brut[3] et les ajouts au 100LL du secteur en amont.

Il convient de souligner que la chute du prix du pétrole brut en 2020 ne s’est pas accompagnée de nouvelles entrées dans le classement 100LL du secteur en amont.

* Graphique disponible en anglais seulement

Bien entendu, des pertes et des quasi-accidents en amont notables se sont produits au cours des deux dernières années, notamment en Malaisie, dans la mer du Nord et aux États-Unis. Au moment de la publication, aucune de ces pertes n’était évaluée à plus de 189 millions de dollars américains de dommages matériels, montant qu’il faut atteindre pour être admissible au classement 100LL. Cependant, il convient de noter que les huit années d’absence d’entrées allant de 1993 à 2001 ont été suivies d’une période subséquente de 15 ans qui a enregistré 14 entrées dans le classement. Cela renforce l’importance de maintenir de solides protocoles de gestion des risques et d’atténuer efficacement la complaisance qui s’insinue dans la psyché collective de l’industrie. De même, le taux d’événements liés à la sécurité opérationnelle de niveau 1 au cours de la dernière décennie est demeuré quelque peu constant[4], ce qui souligne qu’il reste encore des améliorations à apporter aux pratiques de travail sécuritaires dans le secteur en amont.

La question est de savoir si, ou quand, les événements de cyberattaque figureront au classement 100LL

À l’heure actuelle, aucune des entrées dans le classement ne découle directement d’une cyberattaque, et il sera intéressant de voir si cela changera au cours des prochaines années. En mai 2021, nous avons constaté l’effet de l’attaque par rançongiciel sur le Colonial Pipeline, l’une des plus importantes cyberattaques de l’histoire des États-Unis. Ces attaques qui ont été rendues publiques ont été menées contre des infrastructures essentielles du pays. Bien qu’il n’y ait eu aucun dommage matériel direct attribuable à cet incident, celui-ci a eu une incidence sur les activités de la société et a sonné l’alarme pour les gouvernements, les organismes de réglementation et les collectivités. Pour le moment, il semble que l’objectif des auteurs de cyberattaques soit de perturber plutôt que de détruire. Cela dit, le maliciel Triton, qui vise précisément à ouvrir une brèche dans les systèmes de contrôle de la sécurité, et le maliciel Stuxnet, qui cible les systèmes de contrôle de la surveillance et d’acquisition de données, servent tous deux à rappeler que les cyberattaques peuvent donner lieu à d’importants dommages matériels et à la perte de vies.

Conclusion

Au cours des deux dernières années, on a constaté une réduction significative du nombre de nouvelles entrées dans le classement 100LL, par rapport à l’histoire récente, et l’industrie de l’énergie mérite certainement des félicitations. Toutefois, il est peut-être prématuré de conclure qu’il y a eu une amélioration fondamentale des pratiques d’exploitation, d’inspection ou d’entretien, ou de la maturité globale de la gestion des risques, car cette amélioration du rendement peut être attribuée, du moins en partie, à une diminution de l’activité sur site, ou à des mesures opérationnelles à court terme mises en place en réponse à la pandémie de la COVID-19. Les risques à long terme associés à la pandémie restent à voir, et les risques liés à la cybersécurité demeurent un sujet de préoccupation croissant.


[1] Dollars par baril

[2] Utilisation et capacité des raffineries, US Energy Information Administration

[3] Macrotendances

[4] Indicateurs de rendement de l’IOGP en matière de sécurité, événements liés à la sécurité opérationnelle, données de 2020

Les 100 pertes les plus importantes du secteur des hydrocarbures

Ce numéro présente également des réflexions sur les deux dernières années et donne aux professionnels de l’industrie de l’énergie un aperçu de l’éventail des pertes qui peuvent se produire, de la diversité des causes profondes potentielles, de la faillibilité des mesures de prévention et de l’ampleur des conséquences éventuelles.

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