Les mégadonnées et l’intelligence artificielle sont en bonne position pour transformer radicalement l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement et de logistique sur le plan mondial, fait remarquer Andreas Berger, président et chef de la direction de Swiss Re Corporate Solutions.
« Au cours des 15 prochaines années, nous nous attendons à ce que l’industrie maritime mondiale soit entièrement interconnectée, intégrée et numérique », déclare-t-il.
« Cette situation se traduira par des améliorations du rendement et des gains d’efficacité inégalés. Elle favorisera également la mise en place de services financiers, d’assurance et de transport maritime novateurs, entièrement intégrés et fondés sur les données.
Dans ce contexte, nous devons travailler ensemble à établir des normes relatives aux lacs de données et à la protection de celles-ci, car des partenariats numériques nous permettront de tirer profit des avantages de la numérisation. »
Le sondage de 2019 fait ressortir un changement d’opinion au sujet des enjeux liés aux finances, à la sécurité et au commerce
Pour cette deuxième année de sondage, il est intéressant de souligner que les opinions des répondants sur certains enjeux ont changé.
Par exemple, en 2019, les répondants se sont montrés plus confiants dans certains domaines financiers.
Les répondants de cette année ont été moins portés à considérer l’accès insuffisant au financement comme un enjeu important, puisque la note est descendue à 2,65, comparativement à 3,01 en 2018.
Michael Parker, président, marché mondial des transports, de la logistique et des services hors frontières chez Citi, a le sentiment que le raffermissement de la confiance relative à l’accès au financement peut s’expliquer par un certain nombre de facteurs.
« Premièrement, les propriétaires ont l’impression que la capacité excédentaire a été absorbée. Avec l’idée que la plupart des marchés du fret toucheront des revenus plus élevés en 2020, de meilleures perspectives se traduiront par un intérêt renouvelé des investisseurs envers les dettes, et même envers les marchés boursiers », déclare-t-il.
« Deuxièmement, les difficultés du secteur du financement maritime sont presque terminées, puisque les banques quittent le secteur ou réduisent leur degré d’exposition aux risques après avoir atteint leur objectif. Par conséquent, il reste un groupe compétitif de prêteurs déterminés et lucides, qui se concentrent sur des propriétaires et des projets de qualité.
Troisièmement, les défis posés par les nouvelles réglementations, notamment la norme IMO 2020 visant à réduire de 50 % les émissions de GES, dont tout le monde sait qu’il s’agit seulement d’un premier pas, et les répercussions plus larges d’une réduction des GES dans la chaîne d’approvisionnement maritime, font prendre conscience à tout le monde que l’envergure et la solidité financière seront essentielles. »
« Pour les entreprises qui peuvent gérer ces nouveaux enjeux plus complexes, le financement sera au rendez-vous, et c’est pourquoi nous constatons une confiance renouvelée envers l’accès au financement de la part de ce type de participant dans l’industrie. En ce qui a trait aux propriétaires de petites et moyennes entreprises, l’accès au financement est possible auprès de certaines banques ou d’autres prêteurs, mais il y a un prix à payer. »
Contrairement au gain de confiance envers les questions financières, les répondants au sondage de 2019 ont l’impression qu’un incident majeur lié à la sécurité aurait un impact plus important qu’en 2018.
En 2019, la note relative à l’impact est de 3,11, comparativement à 2,76 en 2018, tandis que la note relative à la probabilité demeure relativement faible, comme l’année dernière. De plus, les répondants ont encore accordé une note relativement élevée à la préparation.
Cependant, selon Alastair Marsh, président et chef de la direction de Lloyd’s Register, il y a trois raisons principales pour lesquelles les intervenants de l’industrie maritime devraient être préoccupés par la probabilité qu’un incident majeur lié à la sécurité survienne.
« Premièrement, il y a le risque inhérent lié aux nouvelles réglementations, qui exigent souvent des changements de méthode de travail et l’utilisation de technologies émergentes », déclare-t-il.
« Deuxièmement, les navires devenant de plus en plus tributaires des technologies sans cesse plus complexes et interdépendantes, une défaillance devient une tâche tout aussi complexe à prévoir. Il y a aussi le risque accru de cyberattaques, qui ont le potentiel de causer un incident majeur lié à la sécurité.
Troisièmement, il y a des facteurs hors du contrôle de l’industrie en raison de l’incertitude géopolitique. »
Bien que la sécurité dans le transport maritime se soit améliorée au cours des années, nous perdons quand même 100 navires chaque année en moyenne, et le nombre d’accidents de travail et de décès continue d’être élevé comparativement aux autres industries.
Selon Marsh, l’industrie maritime peut faire face à ces risques et améliorer son rendement en matière de sécurité de plusieurs façons. « Nous devons continuer d’évaluer et de modéliser les risques entourant les nouvelles technologies, tout en accordant la priorité aux cybermenaces.
L’examen d’autres secteurs, notamment l’aviation, pour savoir comment ils gèrent les risques liés aux technologies en évolution rapide, pourrait également s’avérer profitable. »
Relever les défis au sein de l’industrie maritime
Beaucoup de sujets de préoccupation qui empêchent les professionnels du milieu maritime de dormir font la une des médias internationaux.
Les cyberattaques et les menaces sur les données et les nouvelles technologies.
Une crise économique et des guerres commerciales. La géopolitique dans des régions telles que le détroit d’Hormuz et la mer de Chine méridionale.
Le changement climatique et la réalité des ressources limitées.
Les cybermenaces sont restées pratiquement en tête de liste des préoccupations soulevées dans le sondage de 2019 et devraient demeurer au haut de la liste.
Le transport maritime fait partie des infrastructures stratégiques mondiales et locales qui ont subi des attaques de plus en plus nombreuses au cours des dernières années.
Les préoccupations économiques et géopolitiques restent importantes cette année. Les préoccupations financières sont dues à des enjeux tels que les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine.
Si l’économie mondiale stagnait, l’industrie maritime serait rapidement touchée. Les personnes interrogées dans le cadre de notre étude ne pensent pas que l’industrie soit bien préparée à faire face à une telle perturbation.
Les enjeux environnementaux sont centraux dans les résultats du sondage de cette année, et de nouveaux enjeux très préoccupants s’y sont ajoutés : la décarbonisation des transports et une nouvelle réglementation environnementale, respectivement au deuxième et au troisième rangs au chapitre de l’impact potentiel.
Les principales sources de préoccupation dans le sondage de cette année sont sans aucun doute le changement climatique et les efforts de décarbonisation des transports, que nous abordons un peu plus en profondeur dans un chapitre de ce rapport.
Le principal point à retenir de notre examen des principaux enjeux de 2019 est peut-être que les personnes interrogées ont l’impression que l’industrie maritime est relativement peu préparée à y faire face.
Ce point de vue n’a pas changé par rapport à l’an dernier. Plutôt que d’être un sujet d’inquiétude, nous espérons que cette perspective sur la préparation est considérée comme un défi à relever.
Nos recherches qualitatives indiquent que l’industrie a le pouvoir de jouer un rôle déterminant relativement à bon nombre des principaux enjeux à long terme et qu’elle dispose de l’expertise et des ressources nécessaires pour y travailler.